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Nuuk, Groenland

Siorarsiorfik
Une analyse urbaine

Analyse par : Adoum Arsin Ahmat, Pierre-Louis Dumont, Samuel Létourneau et Maxime Vaillancourt-Cossette
Décembre 2024
Contextualisation

L'avenir de Nuuk

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Le Groenland, dont le ¾ de la superficie est inapte à une occupation permanente, est habité d’environ 57 000 personnes, dont 50 000 sont des Inuit (Minority Rights Group, s. d.). Traditionnellement nomades, le quotidien de cette population a été profondément bouleversé par la colonisation (Hemmersam, 2021) et continue de l’être par l’impact des changements climatiques.

La prolongation des étés et l'augmentation de la fréquence des tempêtes violentes nuisent désormais à la chasse, ce qui inquiète les Inuit du Groenland (Buijs, 2011). Confrontées au déclin de leurs activités traditionnelles économiques (et de subsistance), plusieurs familles s’exilent des petites communautés vers les grands centres urbains (ibid). Tandis que les femmes, généralement plus éduquées, parviennent à s’intégrer avec une certaine aisance à leur nouveau milieu, les hommes qui détiennent essentiellement une expérience relative aux activités traditionnelles se voient marginalisés et vulnérables dans ces milieux urbains qui reflètent rarement leur identité (ibid). En outre, cette migration des hameaux vers les grands centres se traduira par une croissance démographique soutenue à Nuuk d’ici 2030 (Kommuneqarfik Sermersooq, 2018).

La capitale est cernée de dénivellation contraignant fortement l’emplacement des développements possibles. Tandis que le centre-ville se densifie, davantage de logements sont nécessaires pour répondre à la demande future ; c’est dans cette optique qu’a été proposé le projet de quartier Siorarsiorfik, un secteur satellitaire à la ville actuelle (Kommuneqarfik Sermersooq, 2018). Ce projet s’inscrit dans une volonté explicite de faire de Nuuk la capitale de l’Arctique (Kommuneqarfik Sermersooq, 2017), fantasme qui ne date pas d’hier pour cette ville qui a été un laboratoire d'architecture et d'urbanisme pour plusieurs concepteurs (Escach, 2019; Hemmersam, 2021).

Tiré et adapté de: Google Earth et topographic-map.com

https://en-gb.topographic-map.com/map-c66m2/Nuuk/?center=64.1696%2C-51.67385&zoom=12&base=3

Ainsi, dans quelle mesure le quartier Siorarsiorfik offre-t-il une qualité urbaine arctique soutenant l’identité culturelle tout en limitant son propre impact sur les changements climatiques ?

Master plan original alt.png

Traduction de : Kommuneqarfik Semersooq, Diagrammatisk masterplan af hovedstrukturen, 2017

https://kp.sermersooq.gl/media/3805/siorarsiorfik-designmanual_dk.pdf

Enjeux

Mobilité urbaine
Culture et identité

Bien que près de 88% des Groenlandais soient des Inuit (Minority Rights Group, s. d.), l'idéologie a longtemps été à la colonisation et à l'assimilation et de ce peuple en vue d'étendre le règne du Danemark (Hemmersam, 2021). Dans le contexte où les changements climatiques contraignent les Inuit à habiter les grands centres dont Nuuk, il semble essentiel d'interroger l'adéquation entre le quartier proposé et la culture inuite. 

Migrer d'une petite communauté axée sur les activités traditionnelles vers un grand centre nécessite une adaptation importante. Toutefois, la ville doit également offrir des opportunités et des qualités urbaines pour stimuler cette adaptation. En supportant et en favorisant des mobilités autres que l'automobile, une ville limite la pression qu'elle exerce sur l'environnement. En outre, un quartier compact et varié limite les distances à parcourir en cas d'événement climatique extrême.

Pression environnementale

Cet enjeu correspond au paradoxe de la croissance de Nuuk. En effet, l'ensemble des activités humaines, y compris celles des autres pays ont un impact sur le climat partout, mais tout de même marqué au Groenland. À cause de la transformation du mode de vie qu'ils engendrent, les changements climatiques ont une part de responsabilité dans la croissance démographique des grands centres (dont Nuuk), ce qui impose la densification et la création de nouveaux quartiers.  Dans ce cercle vicieux, il semble essentiel de limiter la pression qu'exerce le projet sur l'environnement .

L'avenir de Nuuk
Enjeux
Cadre théorique

Cadre théorique

cadre théorique v3.jpg

Puisque le cadre théorique vise l'évaluation de l'adéquation des trois enjeux et non leur application individuelle, les critères d'analyse imbriqueront ces trois piliers. D'abord, limiter l'impact environnemental fait intrinsèquement partie des deux autres dimensions. En effet, favoriser une mobilité urbaine douce réduit la dépendance à l'automobile, et ainsi, la quantité de routes à construire, en plus de réduire les émissions de gaz à effet de serre liées à l'usage de la voiture (GES). Les Inuit accordent quant à eux un grand respect au territoire, à l'entité vivante que représente Nuna (Brière et Laugrand, 2017 ; Ipellie, 1992)). Regroupés sous les thèmes de Bentley et al. (2012), les critères retenus, tisseront ainsi des liens entre la qualité de la mobilité urbaine, le support à l'identité culturel et la réduction de l'impact environnemental lié aux activités humaines.

Critères d'analyse
Perméabilité

La perméabilité peut être comprise comme la multitude de parcours possibles pour se déplacer d'un point A à un point B (Bentley et al., 2012). Ce critère affecte ainsi où les gens peuvent aller, et de quelle manière ils s'y rendent. Cela s'apparente fortement à la connectivité décrite par Chapman et al. (2025), qui d'après eux, stimule non seulement la mobilité douce, mais a également un impact positif sur l'économie. Ainsi, en offrant des occasions stimulantes de se déplacer à l'échelle piétonne, la perméabilité (ou la connectivité), tout comme les critères qui seront présentés après, réduit la dépendance à l'automobile, en plus d'offrir une occasion d'être plus près du territoire, plus à l'image des déplacements des Inuit avant la colonisation (Ipellie, 1992). Cet aspect est essentiel pour réduire autant que possible les émissions de GES relatives à ce quartier satellite.

 

Comme énoncé par Bentley et al. (2012), quelques facteurs influencent la perméabilité. D'abord, la ségrégation des usagers, qui se définit par la séparation des différents modes de transport en réseaux distincts, ce qui limite les options pour chacun d'entre eux. Ensuite, la taille des ilots importe, puisqu'elle définit la distance qui sépare les intersections. Plus les intersections sont rapprochées, plus il existe de trajets possibles. Finalement, la hiérarchisation du réseau, qui se traduit souvent par des culs-de-sac, réduit le nombre de parcours possibles pour atteindre une destination en distribuant le trafic selon des artères de plus ou moins grande importance.

En outre, la perméabilité peut être physique ou seulement visuelle, contrôlant le degré d'intimité des espaces privés. Ce dernier aspect s'avère particulièrement pertinent par rapport à la culture inuite s'il concerne des vues vers le territoire (Bayle, 2023), qui a longtemps représenté le garde-manger (Brière et Laugrand, 2017).

Ian Bentley, Walkley Netherthorpe, Sheffield, England, 1985

Dans (Bentley et al., 2012; 13)

Ian Bentley, Hierarchical layouts, 1985

Dans (Bentley et al., 2012; 13)

Variété

Ensuite, la variété consiste en la diversification des typologies, des usagers et des usages (Bentley et al., 2012). Bentley et al. critiquent la séparation stricte des usages par zones, l’augmentation de la taille des bâtiments et la répétition visuelle des typologies, qu’ils considèrent comme des éléments contradictoires à cet objectif. Pour optimiser la variété, ils proposent de considérer les besoins réels en termes d’usages et d’activités, de rendre ces espaces accessibles économiquement pour encourager l’occupation et de favoriser les interactions positives dans la ville. La diversité ne se résume pas simplement à mélanger des activités sur un site ; les usages doivent se soutenir mutuellement et être bien situés. Bentley propose que certaines activités, appelées «usages principaux», agissent comme des aimants en attirant les gens sur le site. Les concentrations de logements ou de lieux de travail en sont des exemples, car presque tout le monde doit y aller fréquemment. À ce sujet, Buijs (2010) évoque que les activités économiques traditionnelles comme la pêche et la chasse sont en déclin dû aux changements climatiques, contraignant ainsi plusieurs Inuit à alterner entre travail traditionnel et travail salarié. Ce mode de vie hybride doit être pris en compte dans l’analyse des flux et de la diversité des usages.

 

La variété est également près de ce que Chapman et al. (2025) nomment la structure urbaine et viaire. Cette dernière décrit la compacité et la mixité des quartiers. Les fonctions n'étant pas ségréguées, un quartier compact (donc dense) et mixte invite davantage à se déplacer autrement qu'en automobile; les trajets sont plus courts et stimulants. Une variété d'agrégations peut également conduire à des modes d'implantation culturellement significatifs pour les Inuit, comme le présente Bayle (2023). D'après l'autrice, pour les Inuit, la maison a une dimension bien plus grande que la simple structure matérielle. La maison est un corps protecteur (maison sujet), un espace social (maison famille) et un lien intime avec le territoire (maison territoire). L’espace extérieur devrait donc refléter ces concepts en permettant l’appropriation, les rencontres et une transition fluide entre l’intérieur et l’extérieur. En outre, les bâtiments, généralement implantés sur le sol nu sont les seuls dispositifs pour créer un milieu (Hemmersam, 2021), un extérieur appropriable et invitant pour les Inuit.

Enfin, selon Tim Stonor (2018), la densité urbaine est souvent mesurée de manière rationnelle, mais ce qu’il appelle « l’intensité » de l’activité humaine dans un espace public est un facteur plus pertinent. L’intensité fait référence non seulement à la concentration de personnes, mais aussi à leurs interactions sociales et à leur présence dans des espaces publics, créant une dynamique plus vivante et stimulante. Contrairement à la simple densité, qui ne reflète pas la véritable expérience vécue dans un lieu, cette densité subjective nous ramène à la vision de Robinson, qui suggère que nous devons analyser la ville arctique selon sa propre réalité, et non en la comparant à d’autres villes du monde. La densité objective reste néanmoins pertinente pour évaluer la rentabilité, l’utilité du projet, tout en étant bien entendu adaptée aux réalités nordiques.

Les formes de variété.png

Ian Bentley, Sans titre, 1985

Dans (Bentley et al., 2012; 27)

Ian Bentley, Sans titre, 1985 >

Dans (Bentley et al., 2012; 33)

La portée effective des aimants est de 90 à 120m

90-120m.png
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Myrtille Bayle, Croquis d'implantation, 2023

Dans (Bayle, 2023; 47)

Lisibilité

La lisibilité d'un lieu désigne la faculté d'une personne à se représenter mentalement l'espace qu'elle explore (Bentley et al., 2012). Cette aptitude repose largement sur la configuration de l'environnement et les activités qui y sont réalisées.

Bentley distingue deux niveaux de lisibilité permettant aux usagers de saisir l’agencement d’un lieu. La première repose sur sa forme physique, en grande partie liée à son aspect visuel, tandis que la seconde s’appuie sur les modes d’utilisation aidant à comprendre les fonctions. Ainsi, un espace doté d'une identité marquée favorise une compréhension claire et rapide de son organisation.
Pour en étudier les caractéristiques, Bentley s'appuie sur les cinq critères définis par Kevin Lynch : les quartiers, les parcours, les nœuds, les repères et les limites (Lynch, 1970).

 

Si ce critère ne touche pas directement la culture inuite et l'impact environnemental, un environnement lisible permet toutefois de profiter pleinement de sa perméabilité, de sa variété, et de sa robustesse.

Robustesse

Finalement, la robustesse correspond à la capacité des lieux d'accueillir différentes activités (Bentley et al. 2012). En outre, comme le rapporte Buijs (2011), les communautés observent une instabilité croissante du climat, marquée par des hivers plus doux, des étés prolongés et une durée accrue de l’automne. Plusieurs auteurs soulignent le potentiel des environnements bâtis à s’adapter harmonieusement aux forces naturelles et aux dynamiques climatiques, notamment dans les régions arctiques. La gestion des microclimats, conditions climatiques influencées par la morphologie urbaine, joue un rôle clé dans ces adaptations. Chapman et al. (2025) ajoutent que l’hiver dans l’Arctique façonne les formes urbaines, les paysages et les espaces publics, démontrant ainsi la nécessité de créer des espaces publics et semi-publics flexibles et adaptés à ces conditions changeantes, facilitant le maintien d'activités traditionnelles en lien avec le territoire (Bayle, 2023). La neige, la glace et l’eau peuvent non seulement modifier nos perceptions visuelles, la lisibilité et la perméabilité de la ville, mais aussi les renforcer en créant des environnements attrayants. C’est ce que Bentley nomme la robustesse, c’est-à-dire une diversité qui permet à l’environnement bâti de s’adapter facilement aux variations climatiques et aux besoins des communautés locales. Cette qualité urbaine est d’autant plus importante avec les changements climatiques auxquels les communautés nordiques font et feront face pour les décennies à venir.

Ian Bentley, Blundell's corner site, Hull, 1985

Dans (Bentley et al., 2012)

Capture d’écran, le 2024-12-03 à 20.12_e

David Chapman, Winter season can reduce the usable public realm, 2025

Dans (Chapman et al., 2025)

Dans un autre ordre d’idée, il est pertinent de documenter les facteurs qui influencent les microclimats dans la morphologie urbaine arctique. En raison du faible angle du soleil pendant une majorité de l’année, les villes avec des bâtiments de grande hauteur créent de longues ombres et des zones obscures qui nuisent au confort des habitants. Les vents froids, amplifiés par la présence de hauts bâtiments, peuvent rendre les espaces publics inconfortables (Pressman, 1995). Dans le contexte arctique, il est important de tenir compte des spécificités locales, notamment l’accès au soleil, la gestion des vents et l’intégration de la neige. Le soleil procure lumière et chaleur, et encourage les activités extérieures même pendant les saisons froides. Cependant, les ombres portées par des objets peuvent être jusqu’à 15 fois plus longues que leur hauteur (Pressman et Zepic, 1986) complexifiant l’atteinte d’un ensoleillement direct et constant dans les rues et les places publiques. Les concepteurs doivent donc équilibrer les avantages de l’accès solaire direct avec les limitations imposées par la densité urbaine. En d’autres mots, il faut trouver le point d’équilibre.

David Chapman, Low sun angles in the Arctic, 2025

Dans (Chapman et al., 2025)

David Chapman, Sunlight in the Arctic is highly attractive, s. d.

Dans (Chapman et al., 2025)

Analyse

Analyse

Perméabilité
Ségrégation modale
Ségrégation.png

Siorarsiorfik présente deux réseaux de mobilité distincts ; celui pour les automobiles (doublé de voies piétonnes) ainsi que les sentiers pédestres (Kommuneqarfik Semersooq, 2017). Ces derniers sont, soit pavés, soit battus, selon l’importance d’utilisation planifiée (ibid). Les sentiers principaux sont éclairés pendant l’entièreté de l’année pour assurer un usage hivernal. Un tunnel reliera le quartier aux quartiers existants de Nuuk, tandis que les piétons bénéficieront d’un sentier côtier (ibid). Si pour Bentley et al. (2012) la ségrégation des modes transports est nuisible à la perméabilité, cet aspect est, dans ce projet, compensé par la duplication du réseau piéton ; un réseau pédestre autonome, et un suivant le tracé des routes pour les automobiles.


Avec la notion de connectivité hivernale apportée par Chapman et al. (2025), on peut s’interroger : qu’advient-il de ces sentiers à la venue de l’hiver ? Peu d'informations sont disponibles au sujet de leurs dimensions et de leur entretien hivernal ; il est donc difficile de tirer une quelconque conclusion par rapport à la possibilité de les utiliser pour des modes de transport propres à l'hiver (comme le ski). On pourrait également émettre des hypothèses quant à leur utilisabilité en général. D’une part, la neige peut s’accumuler par endroits et entraver la circulation sur les sentiers (qui ne sont que tapés sur le sol), réduisant de manière significative la perméabilité à la fois physique et virtuelle en limitant le nombre de parcours possibles. Dans ce contexte, les seules voies fiables sont les routes automobiles, qui elles, sont déneigées. Cela démontre la nécessité de dupliquer le réseau piéton à même les routes dans un objectif de favoriser les mobilités douces. D’autre part, à condition que le sol soit praticable (pas trop glacé), on pourrait supposer que la neige masque la plupart des sentiers, laissant place à la formation de nouveaux sentiers de désir par les usagers.

Légende ségrégation.png

Ahmat et al., Ségrégation viaire, 2024

Notons que la fonction des aires noires sur la figure ci-haut demeure incertaine. Une imprécision de la traduction, jumelée avec le principe de pochettes de stationnement annoncé par le manuel de design (2017) mène à une interprétation ambivalente; soit ces zones correspondent à des espaces semi-publics, soit elles correspondent à des pochettes de stationnement.

Formation d'un grand ilot
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Le réseau automobile forme un grand ilot (environ 9,7 ha) dont la perméabilité est très limitée. Dans les autres cas, les dimensions des ilots sont plus restreintes, et des sentiers piétons traversent les ilots, augmentant la perméabilité de ceux-ci.

Ahmat et al., Grand ilot, 2024 >

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Ahmat et al., Culs-de-sac, 2024

Hiérarchisation et culs-de-sac

Le réseau routier présente un certain degré de hiérarchisation. La route principale (vert) effectue la liaison entre la pointe sud de Siorarsiorfik et Qinngorput (quartier existant en périphérie de Nuuk). L’accès aux « sous-zones » se fait par des routes d’accès résidentielles, qui dans certains cas, se terminent en cul-de-sac, déteriorant la perméabilité des secteurs résidentiels.

De nombreux accès piétons aux habitations se terminent de la même manière, tandis que de les prolonger vers la rue aurait offert davantage d’options de parcours. Tels que présentés dans le plan directeur, ces sentiers ne peuvent être utilisés autrement que pour accéder aux habitations qu’ils desservent ; on ne peut traverser le quartier sans revenir sur nos pas.

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Par rapport à ce que Bentley et al. (2012) nomment l’avant et l’arrière, on pourrait questionner l’effet que pourrait causer des sentiers qui traverseraient les cours des grappes d’habitation. En revanche, puisque les Inuit perçoivent le territoire comme n’appartenant à personne (Brière & Laugrand, 2017), les notions de privé et public s’en trouvent altérées.

 

Ainsi, une telle hiérarchisation des accès aux agrégations résidentielles ne semble ni cadrer avec une vision inuite, ni avec une perméabilité qui stimulerait et faciliterait la mobilité douce. La reproduction de réseaux hiérarchisés entraîne une dépendance à l’automobile, ce qui se traduit par une croissance des émissions de GES que l’on tente précisément de limiter dans ce contexte où les migrations sont causées par les changements climatiques.


Toutefois, tous les ilots ne sont pas conçus de la même manière. Certains présentent plutôt un avant (du côté de la route) et un arrière bien définis, avec des sentiers piétons continus à l’arrière. 

culs-de-sac close-up.png

Ahmat et al., Continuité des sentiers, 2024

< Ahmat et al., Avants et arrières, 2024

Interface public / privé

La perméabilité visuelle et physique entre l'espace public et l'espace privé enrichit le domaine public (Bentley et al., 2012), à condition de ne pas dévoiler des activités qui seraient trop privées. Dans le cas présent, l'implantation organique (qui n'est d'ailleurs pas sans rappeler celle des cabines autoconstruites par les Inuit sur le territoire) permet de multiples percées visuelles de la rue vers les espaces partagés définis par les agrégations d'habitations. Dans certains cas, la disposition des sentiers ne permet qu'une perméabilité visuelle. Notons toutefois que le sol, pourvu d'une végétation très basse, ne représente probablement pas un obstacle de taille à l'accessibilité physique. Finalement, bien que Bentley et al. n'abordent pas la perméabilité visuelle de cette manière, Bayle (2023) souligne l'importance de dégager des vues vers le territoire, à l'origine, pour surveiller les activités de chasse et pêche. Même si ces activités traditionnelles sont moins présentes à Nuuk, cet aspect qui semble révélateur de l'identité inuite s'intègre bien à la proposition du quartier.

Ahmat et al., Interface public / privé, 2024

Ahmat et al., Perméabilité visuelle, 2024

Ahmat et al., Perméabilité sur le territoire, 2024

Variété
Usages

Tout d’abord, le projet de développement du quartier de Siorarsiorfik à Nuuk répond directement à la demande croissante de logements, liée à l’augmentation démographique de la ville et à plusieurs initiatives de développement en cours. Sa nature est donc intimement liée à cette nécessité d’expansion urbaine. Cependant, sa réalisation reste conditionnée par des défis économiques et structurels majeurs, comme la construction d’un tunnel qui permettra de relier cette zone au centre de Nuuk.

En analysant la diversité du projet, le premier niveau d’étude concerne les usages. Selon la carte de planification (Kommuneqarfik Semersooq, 2018), le projet prévoit une variété fonctionnelle, avec des zones résidentielles (en jaune), des commerces et services (en orange), ainsi que des installations communautaires (en bleu). Les commerces et installations communautaires constituent des usages secondaires, complémentaires à la fonction principale, qui est l’habitation.

L’organisation de ces usages reflète une stratégie visant à rendre le quartier autonome, compte tenu de son éloignement relatif du centre de Nuuk. Cependant, cette planification repose sur un zonage sectorisé, séparant les différentes fonctions. Bien que cela facilite l’organisation, cela peut affecter la fluidité des interactions entre les usages.

Un axe central structure le quartier, reliant deux pôles principaux de services communautaires : le plateau nord-ouest et le plateau sud-est, connectés par un secteur commercial et un lieu de culte. Les zones résidentielles s’agrègent autour de ces pôles, mais certaines portions, notamment autour des commerces situés entre les deux plateaux, manquent d’interactions directes avec des habitations, rendant ces espaces moins animés et moins accessibles. Actuellement, ce secteur central ne prévoit pas de logements ; leur implantation se fera en dernier lieu, où les espaces résiduels seront utilisés à cet égard.

À propos des flux piétonniers, Bentley et al. (2012) soulignent l’importance d’une accessibilité optimisée pour favoriser la diversité. Cependant, dans ce projet, bien que le plateau nord-ouest bénéficie d’une bonne liaison entre les habitations et les services centraux, le plateau sud-est est moins accessible. Cela s’explique par le positionnement des services à l’extrémité de ce sous-secteur, plutôt qu’en son centre. Par ailleurs, la distance entre les deux pôles, supérieure à 1km, complique davantage la circulation piétonne, notamment à cause des contraintes topographiques du site.

La temporalité d’occupation des espaces est également à considérer. Les trois principaux secteurs le long de l’axe central seront animés principalement en journée, tandis que la zone commerciale centrale risque d’être moins fréquentée en dehors des heures d’opération, ce qui pourrait créer une rupture dans la continuité du quartier.

Ahmat et al., Répartition des usages, 2024

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Ahmat et al., Axe central, 2024

Typologies

Sur le plan architectural, les bâtiments affichent une identité visuelle uniforme. Cette homogénéité s’explique par la nature conceptuelle du projet, qui établit des bases générales pour les concepteurs. Toutefois, des politiques architecturales que la ville met de l’avant pour le secteur Siorarsiorfik visent à refléter l’identité locale et à garantir une qualité et une diversité dans les espaces urbains proposés.

La diversité résidentielle s’exprime à une échelle plus petite, avec environ six typologies de logements. Si ces typologies s’avèrent des bases conceptuelles, les variations se traduisent davantage par des modes d’agrégation différenciés, offrant aux habitants des choix variés en matière de modes de vie collectifs. La disposition des bâtiments et leur relation à la rue génèrent des sous-espaces urbains, favorisant les interactions entre résidents et l’appropriation des lieux, en rappel aux concepts de Bayle (2023) sur l’identité inuit. De plus, dans ce projet, la mobilité douce est principalement mise en avant pour relier les habitations entre elles et au territoire. Cette disposition, accompagnée des modes d’agrégation des bâtiments, propose une diversité d’opportunités de rencontre, enrichissant ainsi les interactions sociales et renforçant les liens communautaires.

En ce qui concerne les espaces publics et leur lien avec le territoire, le projet propose une interaction intéressante entre les secteurs construits et les espaces naturels environnants. Cette configuration génère des espaces publics informels, souvent issus de contraintes topographiques, mais qui enrichissent l’ensemble en offrant des « vides » utilisables par la communauté. Ce dialogue entre urbanité et territoire contribue à une mixité fonctionnelle et spatiale, permettant aux habitants de se reconnecter au paysage naturel tout en profitant des infrastructures urbaines.

Politique architecturale de Siorarsiorfik

Traduit de: Kommuneqarfik Semersooq, Arkitekturpolitik, 2017

https://kp.sermersooq.gl/media/3805/siorarsiorfik-designmanual_dk.pdf

Espace partagé entre les bâtiments résidentiels

Habiter le Nord Québécois, Shared common space between residential buildings , 2024

https://issuu.com/hlnq.linq/docs/16-nordic-villages

Modes d'aggrégation

Traduit de: Kommuneqarfik Semersooq, Diagram, zoner ved bebyggelse, 2017

https://kp.sermersooq.gl/media/3805/siorarsiorfik-designmanual_dk.pdf

Densité

La densité brute du projet est de 16 logements par hectare, ce qui peut être perçu comme relativement faible. Toutefois, en adoptant une approche plus localisée, telle que celle proposée par Robinson (Hemmersam, 2021), cette densité doit être réévaluée dans le contexte particulier du territoire. En effet, les caractéristiques géographiques et culturelles du site jouent un rôle crucial dans la façon dont la densité se manifeste. Le lien avec le territoire est une dimension essentielle de ce projet, et la densité ne doit pas le mettre en péril.

Afin de mieux densifier le quartier, une solution consisterait à envisager des constructions un peu plus en hauteur, tout en prenant en considération les facteurs climatiques. Cela permettrait de maintenir l’équilibre entre développement urbain et préservation du territoire, tout en répondant aux besoins d’un nombre croissant d’habitants. 

Par ailleurs, il est important de prendre en compte l’intensité des usages, comme le souligne Stonor (2018). L’intensité ne se mesure pas par la densité brute, mais par une expérience subjective dont les espaces sont vécus, utilisés et animés au quotidien. L'analyse de l'intensité n’est donc pas possible à l'heure actuelle. Cela nous renvoie à l’idée de Robinson (Hemmersam, 2021), qui insiste sur l’importance d’analyser un projet en tenant compte de la réalité locale, une perspective difficile à saisir dans les premières phases de conception.

Ahmat et al., Densité résidentielle, 2024

Lisibilité

Dans le cas de Nuuk, on peut supposer que l’aménagement du quartier Siorarsiorfik a été conçu en relation à la topographie et l’eau qui constituent un peu les limites naturelles du lieu. En effet l’implantation du projet se fait donc dans la partie la plus plane de ce secteur particulièrement accidenté; le relief contraint les emplacements favorables à l'implantation.

 
La volonté des concepteurs est d’offrir à chaque habitation une vue sur la mer (Kommuneqarfik Sermersooq, 2018). Cependant certains ilots semblent limités en ce sens à cause de vis-à-vis. 


Il est évident que le quartier est défini par le cours d’eau et la limite naturelle du site. Néanmoins, il semble pertinent de souligner qu’il manque de connexion lisible dans la trame urbaine afin de bonifier la relation entre le cadre bâti et la mer. Il n'y a que quelques sentiers qui relient le quartier résidentiel à la côte, ce qui peut également s'avérer problématique en hiver étant donné que ces sentiers risquent de disparaitre avec la neige.

topo projet.jpg

Ahmat et al., Quartier, 2024

Les limites sont des éléments linéaires qui, bien qu’ils ne soient pas perçus par l’observateur comme des parcours, peuvent néanmoins posséder des propriétés directionnelles. Souvent, elles s’interprètent comme des frontières séparant deux zones distinctes, engendrant des discontinuités, comme des rives, des voies ferrées (Lynch, 1970).


Pour ce qui est du projet résidentiel de Siorarsiorfik, la limite est clairement définie par la côte, accessible sur toute la périphérie grâce au sentier qui longe cette côte et créant par ce fait un parcours significatif, donc une promenade pour l’utilisateur. L’accès à l’environnement naturel est primordial aux Inuit, cette promenade le long de la côte favorise donc le sentiment d’appropriation au lieu et à la nature. 

Ahmat et al., Limites, 2024

Le parcours principal se présente comme la grande voie de circulation largement dédiée à l’automobile favorisant la connexion nord-sud du projet. 
Ensuite, on retrouve un second parcours marquant dédié aux accès résidentiels qui pénètre les ilots. 
On remarque cependant plusieurs sentiers piétons qui se terminent en cul-de-sac et qui ne se connectent pas avec la route d’accès principale, complexifiant la lisibilité du lieu. 


Dans l’autre sens, prolonger ces sentiers vers la rue favoriserait une meilleure lecture et pourrait donc offrir un parcours plus simplifié aux résidents.  

Ahmat et al., Parcours, 2024

Les nœuds se définissent comme les points de convergence résultant de l'intersection des principaux parcours au sein de l'environnement.


On remarque deux nœuds significatifs dans le projet, le premier qui est public à la jonction de la route principale dédiée à l’automobile ainsi qu’un second nœud favorisant les accès aux résidences. Bien que ces nœuds soient identifiables, ils ne se démarquent pas plus dans la trame urbaine. Il aurait été pertinent de traiter ces endroits avec l’installation d’un élément significatif afin de marquer l’expérience de l’utilisateur.

Ahmat et al., Parcours, 2024

Dans cette nouvelle proposition d’aménagement de Siorarsiorfik, il est difficile de déceler des repères significatifs qui participent davantage aux activités du quartier.


On rencontre néanmoins un repère principal qui est donc le lieu de culte qui cependant semble être déconnecté du reste du quartier. Le site d’implantation est largement montagneux, on peut également interpréter la montagne comme un repère dans la mémoire collective.

En outre, le duo constitué de la montagne (avec le télésiège qui la coiffe) et de la mer est visible de partout dans le quartier, et permet de s'orienter.

Ahmat et al., Repères, 2024

Vue du sentier côtier vers le centre de Siorarsiorfik, avec un visuel sur l'eau, la montagne et le télésiège.

NordicArch, Sans titre, 2017

https://nordicarch.com/project/nuuk-city-development

Robustesse

Le projet de développement du quartier de Siorarsiorfik situé à Nuuk mentionne l’importance du paysage existant, des conditions climatiques et le fait que les nouvelles constructions doivent accroître les qualités du site. Cependant, les documents du projet ne montrent pas d’étude approfondie des vents; on ne peut qu'émettre des hypothèses concernant l'efficacité de la forme urbaine. Par ailleurs, la présence d’Ukkusissat, la montagne, influence la gestion naturelle des vents dominants provenant de l’est, ces derniers étant bloqués par la montagne. Également, on peut noter l’intégration d’un rythme dans l’implantation des différentes zones résidentielles de manière à minimiser l’impact des vents et à atténuer les courants d’air. Ces dispositifs permettent non seulement de réduire les sensations de froid causées par le vent, mais également de créer des zones plus confortables pour les piétons. Cependant, l’absence de données détaillées sur ces mesures empêche une évaluation complète de leur pertinence. De plus, on observe une attention particulière des concepteurs au niveau des variations de hauteur dans le bâti favorisant la réduction des vitesses de vent pour garantir des conditions agréables dans les espaces extérieurs. Cette approche pourrait contribuer à la robustesse des espaces publics, en limitant la vitesse des vents en dessous de 5m/s.

Ensuite, le projet accorde une grande importance à l’optimisation de la lumière naturelle. L’implantation des bâtiments a été conçue pour maximiser l’ensoleillement tout en réduisant les zones d’ombre prolongées. Cette réflexion s’appuie sur la diversité des hauteurs de bâtiment, leur forme et leur implantation, permettant également de préserver des vues vers l’eau. De plus, le développement ne compte pas de bâtiment de grande hauteur. Cette stratégie encourage les activités extérieures même pendant les saisons froides, renforçant ainsi la qualité urbaine, la robustesse et la perception visuelle des espaces publics (Pressman et Zepic, 1986). Malheureusement, la documentation ne permet pas de conclure si le projet met l’emphase davantage sur la vue vers l’eau ou sur la quantité de lumière naturelle. Dans cette optique, l’un n’empêche pas l’autre.

Tiré et adapté de: NordicArch, Plan, 2017

https://nordicarch.com/project/nuuk-city-development

Traduit de: Kommuneqarfik Semersooq, Diagram, Princip for parkering og sneoplag, 2017

https://kp.sermersooq.gl/media/3805/siorarsiorfik-designmanual_dk.pdf

Traduit de: Kommuneqarfik Semersooq, Diagram, bebyggelsen placeres så der sikres gode lysforhold for alle boliger, 2017

https://kp.sermersooq.gl/media/3805/siorarsiorfik-designmanual_dk.pdf

Kommuneqarfik Semersooq, Diagrammer, bebyggelsen placeres så der sikres udsyn for alle, 2017

https://kp.sermersooq.gl/media/3805/siorarsiorfik-designmanual_dk.pdf

La gestion des cycles de neige et de gel-dégel est intégrée au projet grâce à des zones spécifiquement conçues pour capter la neige, ainsi qu’à des fossés aménagés le long des routes pour faciliter le déneigement. Le « plan bleu » du projet met en valeur les cours d’eau naturels et les fossés aménagés, qui servent à la fois à gérer les eaux de pluie et de fonte et à créer des espaces publics pour tous. L’étude des eaux est très pertinente, mais il serait également important d’illustrer la gestion de la neige pour bien comprendre comment s’orchestre le tout, surtout en période de gel-dégel. On observe de petits espaces pour l’entreposage de la neige près des habitations, mais il n’y a pas d’information sur l’ensemble du quartier. En intégrant ces éléments dans les espaces publics, le projet renforcerait la relation entre les habitants et leur environnement naturel, tout en répondant aux besoins climatiques de la région. De plus, les espaces non aménagés entre les différentes zones de bâti sont pensés comme des espaces polyvalents, offrant des possibilités de jeu, de détente et de rassemblement communautaire. L’intégration de l’eau, de la neige et de la glace dans la conception de ces espaces permet de réorganiser les activités publiques selon les besoins saisonniers, renforçant ainsi la flexibilité et l’attractivité des lieux. D’ailleurs, la mise en valeur de l’eau et du paysage naturel, qu’elle soit estivale ou hivernale, reflète les valeurs culturelles et les besoins des habitants. Les perceptions inuit face aux changements climatiques, rapportées par Buijs (2011), soulignent l’importance d’intégrer les dynamiques naturelles dans la planification urbaine. En exposant les eaux de fonte et en créant des espaces d’interaction entre l’eau et le paysage, le projet respecte cette relation profonde avec le territoire. 

Toutefois, la capacité du projet à s’adapter aux changements climatiques futurs, notamment les hivers plus doux et les cycles de gel-dégel plus fréquents n’est pas clairement énoncée. En ayant, une morphologie urbaine plus robuste, on peut penser que le projet renforcerait la résilience des espaces publics et leur capacité à répondre aux besoins des communautés. En effet, la robustesse du projet, grâce à sa versatilité et à son adaptabilité, constitue un levier important pour réduire les impacts climatiques à long terme.

Traduit de: Kommuneqarfik Semersooq, Snitdiagram, Den blå plan - håndtering af overfladevand, 2017

https://kp.sermersooq.gl/media/3805/siorarsiorfik-designmanual_dk.pdf

Bref, le projet de développement du quartier de Siorarsiorfik montre une intention prometteuse d’appliquer les concepts de microclimat et de robustesse pour concevoir des milieux urbains qui soutiennent une qualité urbaine et l’identité culturelle, mais certains points restent encore ambigus. En gérant efficacement les vents grâce à la présence naturelle d’Ukkusissat et de l’implantation rythmée selon les différentes zones de bâti tout en optimisant la lumière naturelle, il offre une base solide pour une solution urbaine adaptée aux conditions climatiques de l’Arctique. Cependant, l’absence de dispositifs détaillés pour l’entreposage de la neige à l’échelle urbaine et le manque d’informations sur l’impact de l’augmentation des cycles de gel-dégel du plan bleu amènent des interrogations qui ne sont pas abordées par le projet. Une approche plus détaillée serait nécessaire pour répondre pleinement aux réalités locales.

Conclusion

Conclusion

En somme, à partir de cette analyse fondée sur un cadre théorique structuré autour des thématiques de l’accessibilité, de la diversité, de la robustesse et de la lisibilité, il est possible de conclure que le projet Siorarsiorfik parvient partiellement à concilier identité culturelle, qualité urbaine et adaptation aux changements climatiques.

 

Tout d’abord, sur le plan culturel, la configuration du quartier propose des connexions significatives avec le territoire, reflétant les réalités locales. Les repères naturels, comme la montagne et la mer, renforcent le lien des habitants avec le territoire, tandis que les espaces publics bien intégrés offrent des opportunités de mixité sociale. Les agrégations variées des typologies résidentielles sont un exemple favorisant les interactions sociales et une appropriation collective des lieux. Cependant, la connexion limitée entre Siorarsiorfik et la ville de Nuuk soulève des questions importantes, notamment sur l’autonomie potentielle de ce quartier satellite. Dans une perspective d’urbanité inuite, la présence de tunnels pose un problème majeur, car le territoire ne se limite pas à une dimension physique : il est au cœur des pratiques, des croyances et des interactions sociales. Les images du projet suggèrent que l’implication communautaire a été insuffisante et que certaines décisions ont été prises sans tenir compte des opinions locales et à l’écart d'un processus participatif.

 

En ce qui concerne l’adaptabilité face aux changements climatiques, le projet intègre plusieurs mesures pertinentes, telles que la gestion des vents, l’optimisation de l’ensoleillement et l’intégration des cycles neige-gel-dégel. Il intègre également un réseau important de sentiers pour les piétons offrant une mobilité plus liée au territoire qui pourrait réduire la dépendance à l’automobile. Ces initiatives témoignent d’une attention portée aux spécificités du contexte arctique. Toutefois, l’absence de données détaillées sur certains enjeux, comme l’impact de l’augmentation des cycles de gel-dégel, ainsi que la densité relativement faible du quartier, pourraient limiter l’efficacité de l’ensemble en termes de résilience face aux bouleversements climatiques.

Pour garantir la pertinence et l’impact de la suite de ce projet sur les plans culturel et environnemental, il semble essentiel de prioriser une participation communautaire accrue ainsi que des analyses environnementales plus approfondies. Ces étapes permettraient d’assurer la pertinence de ce développement d’un point de vue durable et identitaire.

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